Enrichissez cette base de collectionneurs en ajoutant vous même de nouveaux billets

Pour les collectionneurs adeptes des billets gradés, voici un exemple qui doit vous faire réfléchir avant l’acquisition d’une coupure convoitée pour son grade. En novembre 2017, Heritage Auctions propose à la vente un billet de la Banque de l’Indochine de 20 francs type 1951 Jeune berger Papeete (Réf. BIC #410c*, Kolsky/Muszynski #KM511, Pick #021 ou The banknote Book #B319). Le billet est gradé PMG 58 EPQ et est vendu au prix de 84$ (lot #88140) :

En ce mois de juillet 2025, on retrouve ce même billet de 20 francs en vente sur ebay au prix fixe de 300$. On peut observer, qu’entre novembre 2017 et juillet 2025, le billet, qui a voyagé de Chicago à Chypre, a vu son prix multiplié par 3,5 mais le plus surprenant, son grading a changé pour passer de PMG 58 à Legacy 68PPQ :

Si l’on se base sur l’échelle de Sheldon appliquée par exemple chez PMG, le billet a donc pris 9 grades supplémentaires, c’est vertigineux :

Grade PMGDéfinition
PMG 58Un billet présentant un seul pli traversant la vignette.
PMG 68Les marges et l’alignement sont légèrement décentrés. Le billet peut présenter de très légères traces de manipulation.

Qu’est-ce qui justifie ce changement de « tunique » ? L’appat du gain ? L’incompétence d’un gradeur ? Petit retour en arrière…

Les origines du grading de billets de banques anciens

À la fin des années 1990, le marché de la collection des billets de banque commence à croître fortement, notamment en Amérique du Nord et en Asie. Les collectionneurs réclament les mêmes garanties que pour les monnaies : la protection des billets, une sécurité contre les faux, la standardisation des grades, pouvoir vendre plus facilement à l’international ou simplement sécuriser un investissement de grande valeur. En 2005, PMG (Paper Money Guaranty) est créé par le groupe CCG (déjà propriétaire de NGC pour les pièces). C’est la première grande société dédiée uniquement au grading de billets à grande échelle. La pratique commence à se généraliser, surtout aux États-Unis et en Asie (Chine, Hong Kong) où la culture du slab est très forte.

Le processus de grading

Un billet de banque est examiné par un expert qui :

  • vérifie son authenticité.
  • évalue son état de conservation : qualité du papier, plis, taches, usure des coins, réparations.
  • lui attribue une note sur une échelle standard (par exemple de 1 à 70 chez PMG).
  • l’encapsule dans un holder (un étui scellé) garantissant que le billet ne sera plus manipulé directement.

Les avantages du grading

  • Une garantie d’authenticité : limitation du risque de contrefaçons ou de billets trafiqués.
  • Une protection physique : le scellage protège durablement le billet de l’humidité, de la lumière et des manipulations.
  • Une référence objective pour les transactions : facilitation des ventes ou des achats à distance, car l’état est certifié par un tiers reconnu.
  • Une valorisation potentielle : un billet rare en qualité uncirculated (non circulé) peut prendre beaucoup plus de valeur s’il est gradé.
  • Une liquidité accrue : un billet gradé se revend souvent plus facilement sur les marchés internationaux.

Les inconvénients du grading

  • Un coût non négligeable : le grading coûte entre 20 € et 100 € (voire plus pour des billets de grande valeur). Pour des billets communs, ce processus n’est pas rentable.
  • Les délais : l’envoi, l’expertise et le retour prennent plusieurs semaines. Toutefois, les sociétés de grading choisissent de plus en plus de grader des billets au plus près des collectionneurs en organisant des « grading days » se déroulant le plus souvent lors de salons internationaux, le temps d’un week-end.
  • Une rigidité : une fois le billet gradé et scellé, on ne peut plus le toucher ni le sortir sans casser le scellé (et donc perdre la certification).
  • Un marché biaisé : certains collectionneurs font encore de la résistance et préfèrent manipuler eux-mêmes leurs billets sans la barrière du holder.
  • Les billets trafiqués avant grading : impossible de détecter l’état initial d’un billet une fois ce dernier gradé : rebouchage d’épingles, restauration, rouille, déchirure, lavage, aplatissement des plis, etc.
  • Pas de consensus absolu : bien que standardisé, le grading reste très subjectif : deux sociétés ou deux experts peuvent donner une note complètement différente.

Conclusion

Sur quelques uns de ces derniers points, on observe depuis peu, que des billets de qualité correcte (entre SUP et SPL) sont achetés à prix moyen lors de ventes chez les professionnels. Ensuite, ces billets sont « déslabés » et améliorés afin d’obtenir une note de grading plus avantageuse. C’est ce qui est arrivé à notre 20 francs jeune berger Papeete. Et indépendamment du prix qui va en conséquence avec ce nouveau grade, c’est bien la garantie d’authenticité qui semble remise en cause. Le billet qui a été présenté à la société de grading Legacy était déjà amélioré. Comme moi, l’expert aurait pu vérifier dans les archives d’Heritage Auctions. Seulement, faute de temps ou parce que ce n’est pas dans ses attributions, le billet a été slabé tel quel. Bien que ce cas reste encore au stade d’épiphénomène, on atteint sans doute l’une des limites du grading. Un billet slabé ne devrait plus pouvoir être de nouveau gradé, sauf erreur de libellé ou détérioration malencontreuse du holder. Une base de données mondiale et unique devrait sans doute être mise en place pour parer à toutes les tentatives d’amélioration faites avant ou après le grading. En attendant, bonnes vacances d’été et bonnes trouvailles de billets… à grader ou non.

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